Depuis décembre 2010, des soulèvements émergent dans différents pays arabes du pourtour méditerranéen. Généralement motivés par la dégradation des conditions de vie des populations, en liaison avec un déficit considérable d’offres d’emplois, ils connaissent des développements très différents allant de la guerre civile, comme en Libye, à un raidissement politico-social conservateur, comme en Syrie, ou à l’amorce d’une véritable transition démocratique, comme en Tunisie voire en Egypte.
Face à cette situation, les décideurs européens habitués à traiter avec des pouvoirs globalement homogènes dans leurs gouvernances autoritaires et corrompues, éprouvent des difficultés à adapter leurs discours et leurs initiatives.
De fait, la diversité des réactions des dirigeants des pays arabo-méditerranéens, ajoutée à celle des évolutions entreprises, imposent de différencier plus nettement les politiques et les instruments relationnels avec ces pays.
Imaginer de nouveaux instruments
Il semble ainsi souhaitable d’adapter les outils existants tels le Partenariat Euromed, la PEV, l’UpM ou autres.., pour élargir l’offre de coopération et proposer aux pays, ayant conduit une véritable révolution démocratique, des perspectives nouvelles plus ambitieuses qui constituent une véritable « prime » à la modernisation.
Cette proposition doit s’appuyer sur la définition, par le pays lui-même, des objectifs qu’il se fixe en matière de révisions des constitutions, des institutions, des règles électorales etc .. et sur un processus d’évaluation conjointe de l’avancement des progrès accomplis.
Les critères Etat de droit, égalité hommes/femmes, protection des minorités, liberté de l’exercice des cultes, respect des engagements internationaux seront certainement centraux dans l’évaluation envisagée.
Afin d’accompagner les pays ayant choisi cette démarche dans leurs efforts pour atteindre leurs objectifs, il convient d’imaginer de nouveaux instruments et de nouveaux horizons qui constituent à la fois un soutien solide et crédible aux ambitions des populations concernées, mais aussi un véritable projet partagé. Ce dernier doit être suffisamment attrayant pour nourrir une coopération fondée sur un partenariat respectueux et équilibré.
Accord de solidarité
Ce soutien européen doit donc privilégier la création d’emplois, la sécurité alimentaire et la suffisance de la ressource en eau, puis l’accès aux autres biens essentiels (la santé, l’assainissement, l’éducation, le logement, l’énergie etc..), selon un échelonnement qui réponde aux urgences définies par les nouveaux pouvoirs élus et aux exigences imposées par la dégradation des situations économiques dans des pays fragilisés par la crise mondiale.
Il passera sans doute prioritairement par l’appui à l’éducation et à la formation professionnelle et, plus généralement, par la définition de nouveaux moteurs de croissance, plus équilibrés socialement et plus innovants. Cet appui nécessitera la mise en place sans délai d’une aide d’urgence, puis de crédits remboursables importants.
Mais un tel soutien ne suffira pas à motiver les efforts et les sacrifices indispensables au succès de la révolution. Il faudra imaginer un aboutissement, un objectif ou un horizon réellement séduisant qui puisse mobiliser non seulement les décideurs mais aussi les populations. Cet enjeu proposé aux pays en marche vers la démocratie reste à définir.
Il pourrait cependant reposer sur un « Accord de solidarité » qui s’inspirerait du statut d’associé tel qu’il est accordé par l’Union européenne à la Norvège ou à la Suisse. Ce statut prévoirait, la mise en place d’outils de convergence économique et sociale aboutissant, graduellement, à la libre-circulation des marchandises, des services, des capitaux et des personnes et l’association par voie de consultation à la préparation des directives européennes sur les domaines industriel, agricole et douanier.
Source : Article parus sur le site Econostrum le 26 avril 2011.
http://www.econostrum.info/Impact-des-revoltes-arabo-mediterraneennes-sur-les-relations-euro-mediterraneennes_a5447.html
Jean-François Coustillière, consultant indépendant associé au groupe d’analyse de JFC Conseil et Membre du Comité scientifique de confluences Méditerranée.
29 avril 2011