Pour Donald Trump, Gaza est un champ de ruines au potentiel stratégique. Le président des États-Unis a suggéré de déporter temporairement les populations palestiniennes afin de « faire le ménage. » Une proposition qui fait écho aux idéaux de l’extrême droite israélienne. Selon l’ONU, les dégâts à Gaza sont tels qu’il faudra quatorze ans pour déblayer les 42 millions de mètres cubes de gravats qui étaient autrefois des hôpitaux, des universités et des mosquées. Bien que les bombardements aient réduit Gaza à néant, les Gazaouis reviennent massivement sur leurs terres.
En dépit des mesures prévues par le cessez-le-feu, Donald Trump envisage un plan controversé pour les Palestiniens exilés par la guerre. Il propose leur déplacement massif vers l’Égypte et la Jordanie, pour une durée indéterminée, afin de permettre une « remise en ordre ». Les deux pays concernés ont fermement rejeté cette idée, tandis que la Ligue arabe met en garde contre les risques d’un nettoyage ethnique. Cette proposition pourrait être perçue comme un geste de soutien de Donald Trump à l’extrême droite israélienne, frustrée de ne pas avoir « terminé le travail ». Couplée à son insistance sur la fragilité de l’accord de cessez-le-feu et à la reprise des ventes d’armes à Israël, cette déclaration pourrait annoncer une éventuelle reprise des bombardements israéliens. Donald Trump prépare-t-il la voie à une annexion de la Cisjordanie par l’État hébreu ?
Donald Trump considère la question palestinienne comme un problème à « résoudre » en favorisant le déplacement forcé des Palestiniens hors de Gaza. Son entourage, composé de figures pro-annexion, soutient l’idée que les Palestiniens n’ont aucun droit à un État. Trump veut apparaître comme celui qui impose un cessez-le-feu à Netanyahou pour discréditer Biden, tout en maintenant une continuité stratégique qui ne remet pas en cause l’objectif israélien d’expulser les Palestiniens.
Sur le plan diplomatique, Trump ne prévoit pas d’augmenter les droits de douane sur l’Égypte et la Jordanie, mais les États-Unis conservent une pression considérable sur Le Caire via l’aide financière. L’économie égyptienne, en grande difficulté, pourrait être un levier pour imposer à Sisi l’accueil de réfugiés palestiniens. En parallèle, l’Arabie saoudite, sous la direction de MBS, ne peut ignorer la forte opposition populaire à la politique israélienne. MBS pourrait chercher un compromis en accordant certains droits civiques aux Palestiniens en Cisjordanie, mais l’équilibre entre ses intérêts et ceux de Trump reste incertain.
La stratégie israélienne, notamment sous l’influence de l’extrême droite, vise à rendre Gaza invivable pour pousser les Palestiniens à l’exode. Cependant, nombre d’entre eux, conscients du précédent de la Nakba de 1948, refusent de partir, sachant qu’un départ signifierait un exil définitif. Malgré l’accord de cessez-le-feu, Netanyahou n’a aucune solution politique pour la suite. Il tente de faire émerger des figures palestiniennes compatibles avec Israël, mais celles-ci risquent d’être perçues comme des traîtres. Le Hamas, malgré les destructions, continue à administrer la région pour prouver sa résilience.
Enfin, Netanyahou prévoit la reprise de la guerre après cette première phase de trêve, avec le soutien de Trump, qui a décidé de livrer des bombes refusées par Biden. Pourtant, Gaza n’a jamais été une priorité stratégique majeure pour Israël, à l’exception de l’extrême droite. L’enjeu principal reste la Cisjordanie, d’où l’idée de Trump d’inciter au départ des Palestiniens vers la Jordanie. Une partie de l’extrême droite israélienne inverse même la narration historique, prétendant que ce sont les Palestiniens qui auraient annexé la terre d’Israël, illustrant un basculement idéologique profond.
Agnès Levallois, vice-présidente de l’iReMMO.