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Bachar al-Assad à nouveau fréquentable?

Cela a permis au régime de la région qui souhaitait reprendre l’angle “Bachar Al-Assad” sans trop oser le faire ouvertement car cela remettait en question la politique que ces pays avaient suivi, je pense en particulier à l’Arabie Saoudite, que le tremblement de terre a donné un prétexte formidable pour dire “voilà, nous on vient en soutien à la population”, et cela a permis de pouvoir discuter avec Bachar Al-Assad. Mais il me semble que cette ruée de responsables arabes en Syrie; c’est vraiment le retour de l’autoritarisme et la concrétisation du phénomène de contre-révolution qui a été mené par les pays du Golfe et fortement déstabilisés par les mouvements de contestation de 2011 et de 2019 avec la réplique qu’on a vue. Donc là on assiste vraiment à la volonté de ces pays qui ont pris la tête de la contre révolution de dire “finalement, stabilité ou non, ce n’est pas ça qui compte, nous ce qu’on veut ce sont des régimes autoritaires qui vont imposer leur façon de faire, parce que parler de stabilité aujourd’hui qu’est-ce que cela veut dire quand on a un pays complètement détruit avec sa moitié de sa population qui n’est pas là, tous ces arguments sur la stabilité ne veulent pas dire grand chose, mais ce qui est clair est cette volonté, ce retour de cet autoritarisme incarné par les Emirats, et maintenant l’arabie saoudite avec.”

 

“Il est vrai que l’on a vu des réunions entre les chefs de services de renseignement syrien et turcs après les ministres des affaires étrangères des deux pays, où l’on voit que Erdogan est confronté à une élection présidentielle dans quelques jours le 14 mai, et que la question des réfugiés syriens est devenue une question de politique intérieure majeure puisque de nombreux turcs à la faveur de l’aggravation de la situation économique font porter la responsabilité de cet échec économique à la présence de près de 4 millions de réfugiés syriens, et donc dans le discours politique turc, la question est de renvoyer les réfugiés syriens chez eux et donc Erdogan dans sa campagne électorale utilise cette question de la Syrie pour tenter d’obtenir des voix et de montrer aux Turcs qu’il a entendu ce ras-le-bol exprimé par de nombreux turcs à l’égard de cette question. Toute la question de la souverraineté de la Syrie passe aussi par un accord avec la Turquie puisque la Turquie occupe une partie du territoire syrien. Bachar Al-Assad ne cesse de dire qu’il a retrouvé la souverraineté sur son territoire ce qui est encore quand même faux, il ne contrôle pas l’ensemble du territoire mais un accord entre ces deux pays lui permettrait de prouver qu’il a réussi à reprendre le dessus sur son territoire.

 

Les Saoudiens et les Syriens ont passé un accord ensemble concernant le captagon. les Syriens disent qu’ils vont le réguler mais on peut se poser des questions sur ce que va vraiment faire la Syrie puisque le captagon est la première ressource de l’État syrien aujourd’hui. Il va donc falloir être très vigilant de la part de l’Arabie saoudite et des pays concernés pour savoir si cela va vraiment être mis en oeuvre ou non, et honnêtement j’ai de sacrés doutes sur la parole de Bachar Al-Assad dans ce domaine.

 

L’Union européenne est le premier fournisseur d’aide humanitaire à la Syrie, c’est l’union qui permet tous les jours que les Syriens ne meurent pas de faim. C’est donc un levier politique considérable pour l’Union européenne qu’elle ne sait pas utiliser. L’unanimité qui était apparue en 2011 dans la position européenne vis-à-vis de la Syrie à savoir des sanctions, aujourd’hui cette unité est complètement en train de voler en éclat puisqu’il y a deux camps en Europe, il y a les pays comme la Grèce, la Tchéquie, l’Autriche, l’Italie qui souhaitent une normalisation, et des pays comme la France et l’Allemagne qui ont pris eux la tête de ceux qui sont opposés à toute normalisation. Du coup, cette désunion au sein de l’Union Européenne fait le jeu de Bachar Al-Assad, lequel joue de ces divergences mais il faut imaginer que cela représente, et pour ça il faudrait qu’on soit tous d’accord. 

Agnès Levallois, spécialiste de la Syrie, vice-présidente de l’iReMMO

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