La guerre à Gaza s’inscrit dans le long conflit israélo-palestinien, marqué depuis 1967 par l’occupation par Israël de la Cisjordanie, de Jérusalem-Est, et de Gaza (jusqu’en 2005), suivie d’un blocus. Cette occupation est jugée illégale par le droit international, notamment par un avis de la Cour internationale de Justice en 2024. Israël ne cherche pas seulement à riposter contre le Hamas, mais vise à éliminer définitivement la question palestinienne, en écartant toute solution diplomatique, une approche historiquement défendue par l’extrême droite israélienne, qui mise sur l’usage de la force.
En Israël, si beaucoup sont convaincus de la nécessité de mettre un terme à cette guerre et de sauver les otages par des négociations, la société juive israélienne reste profondément traumatisée par le choc du 7 octobre. L’extrême tension avec l’Iran déjà matérialisée par deux attaques de grande ampleur vient encore exacerber ces angoisses. Elle est donc dans l’impossibilité de se projeter au-delà de ses souffrances, qui la renvoie aux périodes les plus tragiques de son histoire pour penser l’avenir autrement que dans une totale négation de l’autre. Pour les Palestiniens, les Israéliens sont plus que jamais les ennemis à combattre, au point que la stratégie de la lutte armée a retrouvé une certaine légitimité auprès de beaucoup d’entre eux. La déchirure entre les deux sociétés est devenue si profonde et si dévastatrice qu’elle fait la part belle aux plus radicaux des deux camps. Dès lors, les voix du dialogue sont bien faibles pour ne pas dire inaudibles en Israël et bien fragiles pour ne pas dire discréditées en Palestine surtout quand il s’agit de l’Autorité palestinienne dirigée par un Mahmoud Abbas enfermé dans son impuissance.
Bien qu’Israël soit perçu comme victime après l’attaque du Hamas en octobre 2023, le gouvernement de Benyamin Netanyahou, soutenu par les États-Unis, utilise tous les moyens militaires à sa disposition. Ce soutien permet à Israël de prolonger le conflit, malgré les critiques internationales, notamment en étendant la guerre au Hezbollah au Liban et potentiellement à l’Iran.
Cette politique, centrée sur l’usage de la force, génère un chaos immense, tant à Gaza où la population est démunie, qu’au Liban où des destructions massives et des déplacements forcés s’intensifient. Dans ces conditions, un avenir pacifié semble impossible, avec une radicalisation croissante des deux sociétés, israélienne et palestinienne. Alors que les négociations et le dialogue s’affaiblissent, la perspective d’une solution fondée sur deux États paraît peu probable en raison de la situation sur le terrain et du manque d’unité internationale. Le risque est celui d’un conflit sans fin, avec des conséquences tragiques pour la région.
Jean-Paul Chagnollaud, président de l’iReMMO.