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« Guerre de Gaza : les dates sont têtues » -par Dominique Vidal, membre de l’iReMMO

Imaginez qu’allant au cinéma, vous vous trompez d’horaire et ne voyez que le dernier quart d’heure du film. Qu’aurez-vous compris ? Les grands médias se sont réveillés lorsque la première roquette du Hamas a touché Jérusalem. Du coup, l’organisation islamiste attaquait et Israël se défendait. Mais les faits sont têtus. La chronologie des événements suffit à éclairer l’écrasante responsabilité de Benyamin Netanyahou, prêt à tout pour sauver son poste après quatre défaites électorales. 

23 mars : Netanyahou a encore raté son coup. Les électeurs israéliens ne lui ont pas donné la majorité de 61 sièges nécessaire pour échapper à la justice, rester Premier ministre et poursuivre sa politique radicalisée. 
 
7 avril : Chargé par le président Reuven Rivlin de former un gouvernement, le chef de la droite tente d’y intégrer à la fois les islamistes de Raam, qui ont quitté la Liste unie pour s’allier avec Netanyahou, et les ultranationalistes du Parti sioniste religieux, eux aussi signataires d’un accord avec le Likoud – y compris Force juive, qui se réclame du parti du rabbin Meir Kahane interdit pour « racisme ». Mais la manœuvre échoue, les deux factions refusant de siéger ensemble.
 
19 avril : Le chef du Likoud tente deux ultimes manœuvres. Il tente de relancer l’idée de l’élection du Premier ministre au suffrage universel. Car la majorité des Israéliens estime que Netanyahou est le plus apte à diriger le gouvernement. Le projet, toutefois, s’enlise, comme sa candidature à la succession de Rivlin à la présidence, prévue le 2 juin. Le Likoud se prépare à passer dans l’opposition.
 
22 avril : Plusieurs centaines de kahanistes et d’utra-orthodoxes armés commencent à « ratonner » à Jérusalem-Est au cri de « Mort aux Arabes ! » Les Juifs orientaux ressemblant aux Palestiniens, les nervis choisissent leurs victimes en fonction de leur accent en hébreu. Ces violences durent près d’une semaine, de la Porte de Damas jusque dans la Vieille Ville et les quartiers de Jérusalem-Est. 
 
29 avril : Mahmoud Abbas reporte les élections législatives et présidentielle de juin-juillet. C’est l’occasion ou jamais pour le Hamas d’imposer son leadership, face à une Autorité palestinienne en décomposition. Quant à la vieille garde du Fatah, elle redoute moins une victoire électorale des islamistes que celle de la liste dissidente inspirée par Marwan Barghouti.

Plusieurs centaines de kahanistes et d’utra-orthodoxes armés commencent à « ratonner » à Jérusalem-Est au cri de « Mort aux Arabes ! » Les Juifs orientaux ressemblant aux Palestiniens, les nervis choisissent leurs victimes en fonction de leur accent en hébreu.

5 mai : Netanyahou ayant échoué, c’est au tour du centriste Yaïr Lapid de tenter un « gouvernement de changement ». La tâche s’annonce ardue : le colon ultra-nationaliste Naftali Bennet (À droite) prétend lui aussi au premier rôle. La panique transforme le Premier ministre déchu en pyromane. De même qu’il tente de faire dérouiller la négociation entre Washington et Téhéran en bombardant des tankers iraniens et en sabotant la centrale de Natanz, il mise sur une explosion à Jérusalem pour faire échec à Lapid. 
 
6 mai : Après les « ratonnades », le député fasciste Ben Gvir installe sa tente à Sheikh Jarrah pour accélérer la spoliation de 13 maisons palestiniennes. Elles auraient, prétend-il, appartenu avant 1948 à des Juifs. À prouver. Sans oublier que des milliers de maisons de Jérusalem-Ouest étaient la propriété d’Arabes : leurs descendants vont-ils pouvoir les récupérer ? Quiconque a vu Hannah K. de Costa Gavras sait comment leur parcours du combattant se termine…
 
7 mai : En cette fin du Ramadan, le face à face gagner l’Esplanade des Mosquées, que des centaines de policiers investissent. Ils pénètrent jusque dans la mosquée Al-Aqsa, où ils tabassent les fidèles, tirent des balles en caoutchouc et aspergent la foule de gaz lacrymogène. Cette violation du troisième lieu saint de l’islam, qui fait 300 blessés,  scandalise les Palestiniens et, au-delà, l’ensemble du monde arabo-musulman. Que restera-t-il, après, de la normalisation en cours avec Israël ?
 
Nuit du 10 au 11 mai : Le Hamas riposte. En 11 jours, 4 340 roquettes s’abattront sur des villes israéliennes, à commencer – pour la première fois depuis 1948 – par Jérusalem et Tel-Aviv. 
 
13 mai : Le chef de la police Kobi Shabtaï le dit clairement à Netanhayou : « La personne qui est responsable de cette Intifada est Itamar Ben Gvir. » Selon lui, les provocations du député de Force juive et de ses partisans ont mis le feu aux poudres depuis les semaines précédentes. 
 
13 mai, au soir : À Bat-Yam, au sud de Tel-Aviv, se produit le premier lynchage. Un jeune Arabe est sorti de sa voiture et tabassé par des kahanistes. Des télévisions montrent ces images, qui deviennent virales sur les réseaux sociaux. Elles troublent nombre d’Israéliens et scandalisent les Palestiniens. Le phénomène va, hélas, se reproduire, parfois contre des Juifs, souvent contre des Arabes. Jamais les villes mixtes n’avaient connu de tels troubles depuis 1948.
 

Depuis le moment où le mandat a été confié à Y. Lapid, il y a dix jours, en passant par les événements difficiles de Jérusalem – à Sheikh Jarrah et sur le Mont du Temple – en continuant par tout ce qui s'est passé depuis dans les villes mixtes, jusqu'à l'ouverture du front contre le Hamas à Gaza, Netanyahu ne s'est occupé que de ce qui était son objectif principal : faire échouer le “gouvernement du changement”

15 mai : Tsahal pulvérise l’immeuble d’une dizaine d’étages abritant les locaux de l’agence de presse américaine Associated Press (AP) et de la chaîne de télévision qatarie Al-Jazeera à Gaza. Dans l’opinion internationale, ce qui reste de sympathie pour Israël en prend un coup.
 
21 mai : Après 11 jours de tirs de roquettes et de bombardements, un cessez-le-feu entre en vigueur. Le bilan dressé par le Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) est terrible. Dans la bande de Gaza, il recense 242 morts (dont 66 mineurs), 258 immeubles détruits, 15 305 logements sévèrement ou légèrement endommagés ainsi que de nombreuses infrastructures – 800 000 personnes n’ont plus d’accès régulier à l’eau. Les écoles de l’UNRWA accueillent environ 77 000 réfugiés, 35 000 autres étant hébergés par des familles. À Jérusalem-Est, OCHA estime le nombre de décès à 27, dont 4 mineurs. Enfin, en Israël même, on a relevé 12 personnes, dont 2 mineurs ; mais on ne connaît pas toutes les victimes des lynchages. Au total, les hostilités ont blessé 6 381 personnes…
 
Quelques jours plus tôt, sur sa page Facebook, le président du parti sioniste de gauche Meretz faisait une révélation capitale : « Nous étions si près de conclure, raconte Nitzan Horowitz. Dimanche, des progrès significatifs avaient été réalisés dans les négociations. La répartition des postes était presque terminée. Les dirigeants du “bloc du changement” étaient sur le point d’informer le président que nous avions réussi à former un gouvernement. Itamar Ben Gvir et ses milices sont alors passés à la vitesse supérieure. » 
Une journaliste demande alors si Horowitz « suggère que Netanyahu voulait une escalade ». Le président du Meretz rétorque : « Je ne sous-entends rien, je parle clairement : depuis le moment où le mandat a été confié à Y. Lapid, il y a dix jours, en passant par les événements difficiles de Jérusalem – à Sheikh Jarrah et sur le Mont du Temple – en continuant par tout ce qui s’est passé depuis dans les villes mixtes, jusqu’à l’ouverture du front contre le Hamas à Gaza, Netanyahu ne s’est occupé que de ce qui était son objectif principal : faire échouer le “gouvernement du changement”. »
D. V. Pour « La Presse Nouvelle Magazine » de juin.

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LES ANALYSES DE CONFLUENCES

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Le conflit syrien: une tragédie humaine et juridique

Depuis le début de la révolution syrienne en mars 2011, le conflit n’a cessé de se transformer en un engrenage de violence, marqué par des attaques répétées contre la population civile. Alors que le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme estimait en 2022 que 300000 civils avaient péri, l’Observatoire syrien des droits de l’homme porte ce bilan à plus de 500000. Au-delà des chiffres, le conflit syrien a généré des millions de déplacés, et poussé autant de Syriens à s’exiler. La question du droit des victimes reste aujourd’hui un enjeu crucial pour une population qui réclame justice et reconnaissance de ses souffrances.

De Mohamed-Nour Hayed

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