Après les massacres envers la communauté Alaouites, je suis plus réservée sur cette analyse que Ahmed Al-Chareh ait donné les ordres et accepte cette situation. Je rappelle que ces massacres ont commencé après une opération des éléments pro régime Assad qui se sont réfugiés dans cette région dont la communauté alaouite est originaire. Il y a eu des massacres organisés par ces anciens loyalistes militaires, possiblement manipulés par Maher Al-Assad à distance voir par l’Iran. En riposte, il y a eu ces terribles massacres organisés par des groupes radicaux. Ma compréhension est que Al-Chareh veut limiter l’action de ces groupes et que la complexité pour lui est comment faire en sorte d’avoir la main sur eux et éviter que ça se reproduise.
Sûrement Al-Chareh doit donner dégage et doit démarquer de ces massacres catastrophiques pour son image et pour toutes les démarches qu’il entreprend pour permettre à la communauté internationale de lever les sanctions économiques qui sont un élément indispensable pour permettre à ce pays de redémarrer. On ne pas savoir jusqu’à quel point il est sincère dans cette mais depuis son arrivée à Damas il a mis à coté un nombre d’éléments les plus radicaux auxquels il appartenait au passé. Il a effectué une mue et pour l’instant il a donné dégage et a mis en marche cette fameuse conférence nationale Damas pas satisfaisante mais en trois mois arriver à mettre en place cette volonté de tenir cette assemblée. Il ne faut pas tomber dans un piège de s’attendre à tout faire en quelques semaines. Ce qui est clair est que ce pouvoir ne correspond pas aux aspirations d’une grande partie des Syriens, ceux qui ont pris le pouvoir sont décriés par beaucoup de Syriens et font peur de part leur passé, mais comment gérer cette situation au mieux en mettant un cadre pour éviter que ça aille trop loin.
La difficulté est qu’Al’-Chareh vient de cette région d’Idlib qu’il a dirigée avec certain « succès » (électricité, nourriture) sauf que répliquer au niveau d’un Etat failli aujourd’hui alors il faut reconstruire un état. Dans un premier temps, ça lui a été reproché, il s’est appuyé sur ses proches pour une question de confiance pour commencer à établir un système. A Damas, il ne faut pas simplement répéter ce qu’il a fait à Idlib car il faut élargir la base avec laquelle il va travailler, aux minorités, aux femmes, à la société civile très active qui s’est développée pendant ces années de guerre et veut se faire entendre et éviter un certain nombre de dérapage qui ont pu exister à Idlib et que là il veut aussi éviter.
Pour l’instant la diaspora attend de voir comment les choses vont évoluer malgré une volonté de revenir et la difficulté affrontée par les ONG non seulement les sanctions mais aussi qu’il y a tellement de conflits dans le monde pour arriver à mobiliser des moyens pour ces ONG. J’ai des témoignages d’ONG syriennes avec un encadrement international sur la difficulté de lever des fonds. Ce qui forme un enjeu considérable pour ce nouveau régime car s’il n’arrive pas à rétablir un peu d’électricité et permettre aux syriens de se nourrir tout simplement alors qu’ils sortent de 14 ans de guerre, cela va évidemment provoquer une radicalisation que je crois refuse les Syriens et les Syriennes aujourd’hui mais si la situation ne s’améliore pas sur le plan économique ça risque d’être catastrophique.
Agnès Levallois, vice-président de l’iReMMO.