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Le Maghreb face à la question palestinienne

Alors que la scène internationale met en avant la reconnaissance tardive de l’État de Palestine par la France et certains de ses alliés occidentaux, des voix se font cependant plus discrètes : celles des pays du Maghreb.
Ces derniers, acteurs clés du conflit des années 1960 aux années 1990, détournent aujourd’hui le regard, au prix d’une opinion publique nationale défavorable et d’un isolement important au sein d’une région dont le centre de gravité est désormais situé dans les pays du Golfe.
En effet, dans la seconde moitié du 20e siècle, de nombreuses figures de la région s’imposent comme des voix incontournables du conflit israélo-palestinien.
Dans les années 1960 et 1970, l’Algérie est un carrefour où se réunissent les révolutionnaires. De même, en 1974, lorsque Yasser Arafat est invité à prononcer un discours devant l’Assemblée Générale des Nations Unies, Abdelaziz Bouteflika, alors Ministre des Affaires Étrangères algérien en est le Président. Une décennie plus tard, en 1988, c’est à Alger qu’est déclarée l’indépendance de la Palestine. Quant à la Tunisie, Habib Bourguiba, engagé de longue date dans le conflit israélo-palestinien, affiche des positions claires et bien arrêtées. Son pays a accueilli l’Organisation de libération de la Palestine après le départ de l’OLP du Liban.
Ainsi, un « front du refus » d’antan, éloquent et affirmé, notamment incarné par l’Algérie ou la Libye au sein de la Ligue arabe, n’existe plus aujourd’hui. La prudence actuelle des pays du Maghreb contraste avec cet engagement passé.

Face à un engagement clair des décennies passées, comment expliquer cette prudence actuelle de la part des pays du Maghreb?

Cette prudence dans les pays nord-africains reste ainsi indubitable. Si la situation de chaque pays de la région reste singulière, un point commun majeur apparaît. La pression des États-Unis a amené la Mauritanie à normaliser ses relations avec Israël de la fin du 20ème siècle aux années 2010. L’Algérie, qui refuse toute normalisation avec Israël, encadre, voire empêche les manifestations pro-palestiniennes sur son territoire. Quant au Maroc, il a normalisé ses relations avec Israël depuis 2020, obtenant en contrepartie la reconnaissance de la «marocanité» du Sahara Occidental par les États-Unis. Ces relations n’ont pas toutefois été remises en cause dans le contexte actuel de génocide à Gaza. De même en Tunisie, un projet de loi qui avait pour objectif de criminaliser toute relations avec Israël est écarté à la fin 2023 sous pression américaine. L’ensemble de ces éléments illustre un point essentiel: il reflète l’attitude des pays du Maghreb qui agissent en fonction de l’influence américaine. Les pays de la région se trouvent pris en étau entre les États-Unis et leur opinion publique pro-palestinienne que les autorités souhaitent canaliser. Celles-ci se sont illustrées par de grandes manifestations, notamment en Tunisie en fin 2023 et au Maroc. Pour ce dernier, la normalisation des relations avec Israël apparaît comme un facteur de fragilité et de vulnérabilité puisqu’elle entraîne des réactions très hostiles de la part de la population.

Alors que la volonté de désoccidentalisation du monde atteint aujourd’hui son paroxysme, le peuple palestinien fait paradoxalement face à un isolement sans précédent. La tendance est inverse: les pays s’alignent sur la politique américaine, masquant toute initiative visant à mettre fin au génocide à Gaza. Cette évolution s’explique par un changement des logiques mondiales : les pays nord-africains savent qu’ils ne peuvent plus compter sur la puissance et le soutien d’une Union Soviétique disparue, comme ce fut le cas en 1967 lorsque l’Algérie avait rompu ses relations diplomatiques avec les États-Unis. Quant à la Russie, elle n’a aujourd’hui plus les moyens d’offrir aux pays du Maghreb l’appui qu’elle pouvait leur garantir durant la Guerre froide, ce qui les amène à s’aligner, inévitablement, sur la puissance américaine.
Ce silence s’explique également par la fragilité croissante des pays du Maghreb confrontés à des obstacles internes importants. La Tunisie doit faire face à de graves difficultés économiques et politiques, le Maroc reste centré sur la question du Sahara Occidental, et l’Algérie sur la sécurité au Sahel. Sur le plan de la politique extérieure, la priorité demeure accordée aux États-Unis et à l’Europe.

La reconnaissance de la Palestine par les pays occidentaux

La reconnaissance de l’État de Palestine par Emmanuel Macron et d’autres États occidentaux, alors que la grande majorité des pays du monde l’ont déjà fait, constitue un acte symboliquement important. Elle est le résultat de changements notoires dans la politique du président français, qui a longtemps soutenu l’impunité de Benyamin Netanyahou, notamment lors de l’émission du mandat d’arrêt de ce dernier par la Cour Pénale Internationale. Cependant, cette reconnaissance doit impérativement s’accompagner d’actions concrètes, à commencer par une reconsidération des accords entre Israël et l’Union Européenne, au risque d’être vidée de sa portée, car la perspective d’un État palestinien reste illusoire sans le respect du droit international.

ÉDITO

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La Turquie aux avant-postes à Charm el-Cheikh

Alors qu’en Turquie le cours de l’euro est en passe de franchir le seuil fatidique des 50 livres, que l’inflation est repartie à la hausse et que l’on se demande qui sera le prochain maire CHP arrêté, Recep Tayyip Erdoğan s’emploie à faire oublier une conjoncture intérieure plutôt sombre, en faisant feu de tout bois sur le plan international. Grande bénéficiaire de la chute du régime de Bachar al-Assad à la fin de l’année 2024, la Turquie a joué, en effet, en cet automne 2025, un rôle remarqué dans la conclusion de l’accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas à Gaza, en particulier lors du sommet de Charm el-Cheikh. Retour sur cette implication et ses perspectives…

Par Jean Marcou, professeur émérite à Sciences Po Grenoble-UGA

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LES ANALYSES DE CONFLUENCES

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La désertification : un enjeu géopolitique émergent

Sébastien Abis, 22 juin 2009
La Journée mondiale de la lutte contre la désertification et la sécheresse, le 17 juin de chaque année, marque l’anniversaire de l’adoption de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (UNCCD), créée en 1992, suite à une recommandation du Sommet Planète Terre de Rio. Selon l’article 1 de cette Convention, la désertification désigne « la dégradation des terres dans les zones arides, semi-arides et sub-humides sèches par suite de divers facteurs, parmi lesquels les variations climatiques et les activités humaines ». La désertification désigne ainsi le déclin irrévocable ou la destruction du potentiel biologique des terres et de leur capacité à supporter ou à nourrir les populations. Un milliard d’habitants sur la planète serait actuellement menacé par la désertification.

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Lettre d’information de l’iReMMO